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Que faire de la parité Euro/Franc CFA après la crise des dettes publiques en Union européenne ?




 

Faut-il continuer à maintenir la parité Euro-France C FA, dévaluer le Franc CFA ou créer une monnaie régionale pour les pays africains membres de la zone Franc ?
 
Par Lucien Pambou









 


Un billet de 1000 francs cfa  
Un billet de 1000 francs cfa
 





L'Euro est dans une parité avec le dollar entre 1,30 et 1,40. Par rapport au dollar, la crise dans la zone Euro amplifie la méfiance des investisseurs qui exigent des primes de risque plus fortes que celles habituellement demandées. Cette situation va forcément impacter les rapports économiques entre la zone Franc et le reste du monde.

La relation politique et institutionnalo-financière entre l’euro et le Franc CFA doit soulever des interrogations auprès des gouvernements africains. Faut-il dévaluer le Franc CFA comme l’a suggéré une rumeur venant de certains pays de l’Afrique de l’Ouest, Sénégal et Côte d’Ivoire ? Faut-il maintenir la parité en l’état entre l’Euro et le Franc CFA ? Faut-il créer une monnaie régionale comme le suggèrent un certain nombre d’économistes africains ? Une suggestion qui pour l’instant repose sur une analyse théorique et de pur principe et qui malgré la qualité des contributions et des analyses oublie une donnée principale : la domination économique et politique des Etats membres de la zone Franc par la France qui elle-seule décide de la dévaluation du Franc CFA.

La relation politique et institutionnalo-financière entre l’euro et le Franc CFA doit soulever des interrogations auprès des gouvernements africains



Certains économistes africains, animés de bonnes intentions, proposent des débats et des conclusions qui ne correspondent pas toujours à la réalité actuelle des responsables politiques africains. Ces économistes africains estiment que la parité Euro-Franc CFA ne contribue nullement au développement de l’Afrique francophone, mais favorise plutôt les mécanismes d’aide, de dons et d’emprunts vis-à-vis du monde occidental en général et de la France en particulier via l’observance du Trésor sur les politiques budgétaires des pays africains francophones.

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© izf.net  





La zone Franc n'"existe pas" de manière indépendante sur le plan monétaire. La politique monétaire de cette zone est calquée sur les désidératas de la politique monétaire européenne via l’euro. Il faut stabiliser l’inflation et permettre aux politiques budgétaires de jouer leur rôle. C’est la politique monétaire déléguée de l’Euro que fait subir la France aux pays africains de la zone Franc.

En plus des relations contractuelles contraignantes qui obligent ces pays à reverser une grande partie de leurs recettes en devises dans le compte d’opérations géré par le Trésor français en leur nom, force est de constater que les pays africains de la zone Franc sont obligés de subir les évolutions de l’Euro en ce moment et après la crise des dettes souveraines, même si certains d’entre eux estiment par leur faible implication dans la finance internationale être à l’abri de la crise de l’Euro.

Les pays africains, membres de la zone Franc, ne doivent pas rester passifs et commencer à anticiper les conséquences sur leurs économies d’une éventuelle dévaluation, si la France le décide
Lucien Pambou


Selon les statistiques disponibles, les pays de la zone Euro éprouvent de plus en plus de difficultés à trouver des liquidités, même si aujourd’hui la banque centrale européenne a desserré les conditions de refinancement des banques de la zone Euro auprès d’elle. On a fait croire que le problème essentiel des pays en difficulté dans la zone Euro était leur déficit public, mais en réalité il s’agit bien de leur déficit extérieur. L’absence de recettes liées à l’exportation oblige les pays de la zone Euro à s’endetter auprès d’autres pays européens et émergents voire assez paradoxalement américains et asiatiques.



 
© reuters  





Les pays africains membres de la zone Franc, qui ne vivent globalement que de dons et d’emprunts vis-à-vis de la communauté internationale et précisément de la France, vont devoir revoir à la baisse leur plan d’investissement concernant les infrastructures, l’aménagement du territoire (construction des hôpitaux, des écoles, réponse aux besoins socio-primaires, vitalisation de l’agriculture, accès à l’eau potable pour tous et à l’électricité, etc.), les pays européens, membres de l’Euro, vont restreindre leurs aides financières en direction des pays africains membres de la zone Franc.

De nombreux experts ont crié au loup estimant qu’un éclatement de l’Euro était proche. Or les faits actuels tendent à montrer le contraire. Non seulement les gouvernements grec, italien et français ont décidé de lutter contre les déficits mais cette politique vertueuse s’accompagne d’une politique de stabilisation du taux d’intérêt par la banque centrale européenne. Les pays africains, membres de la zone Franc, ne doivent pas rester passifs et commencer à anticiper les conséquences sur leurs économies d’une éventuelle dévaluation, si la France le décide.

Se contenter de dire qu’il faut créer une monnaie pour l’Afrique sans justifier les avantages et les inconvénients, c’est se comporter en ayatollahs de la pensée



Une autre réflexion peut porter sur la sortie éventuelle de la zone Franc. Sur quelle base ? Sur quelle période ? Avec quels Etats ? Selon quelles modalités ? En évitant l’émotion, le sensationnalisme et la prétention intellectuelle de certains économistes africains hors des réalités qui pensent que créer une monnaie nationale est avant tout un enjeu de libération politique et économique. La création d’une monnaie nationale est très complexe. Comment faire de manière singulière pour que nos mamans et nos pères en Afrique non instruits de la théorie bavarde dont les intellectuels sont souvent coutumiers, accordent une confiance réelle à la nouvelle monnaie créée au sein de la zone Franc, sachant que nos économies sont à un stade de pré-intégration et qu’elles ont des difficultés à favoriser les échanges des marchandises et des services entre elles ?



 

 





Ces biens et services sont souvent créés par des entreprises étrangères qui, face à l’incertitude de la nouvelle monnaie créée, laisseront à l’étranger une partie de leur recette d’exportation. Voilà la réalité qui risque de devenir terrible et créer des fuites devant la monnaie nationale créée en direction des monnaies connues et validées, le dollar (comme c’est le cas actuel pour la République démocratique du Congo).

Que les économistes africains sortent de leur tanière théorique et s’expriment le plus largement possible auprès de la diaspora africaine pour justifier leur position ? En se contentant de dire qu’il faut créer une monnaie pour l’Afrique sans justifier les avantages et les inconvénients, c’est se comporter en ayatollahs de la pensée.

La question centrale : que deviendra l’Euro après cette mauvaise passe et comment se comportera le Franc CFA ?

Une autre réflexion peut porter sur la sortie éventuelle de la zone Franc. Sur quelle base ? Sur quelle période ? Avec quels Etats ? Selon quelles modalités ? En évitant l’émotion, le sensationnalisme et la prétention intellectuelle de certains économistes africains



Selon la théorie financière traditionnelle concernant les actifs financiers, il y a fort à parier que la plupart d’entre eux vont augmenter, ce qui va se traduire par une hausse des cours de bourse sur l’eurostoxx qui permettrait de retrouver un price earning ratio, c'est-à-dire le rapport entre le cours boursier d’une action sur le bénéfice plus favorable. Le PER est un indicateur de solvabilité éventuel, ce qui permet de diminuer les spreads de crédit pour les entreprises et pour les banques. Cette réduction du spread permettra de revaloriser les obligations publiques pour les portefeuilles des investisseurs.



 

 





Assez paradoxalement la bonne santé retrouvée sur la classe des actifs financiers va se traduire par une hausse de l’Euro que les statistiques situent dans une parité de l’ordre de 1 Euro = 1,60 Dollar. Nous serons rendus à une crise économique car l’Euro vaudra plus cher que le Dollar. La forte appréciation de l’euro par rapport au Dollar va compliquer la compétitivité dans la zone Euro. Ce qui nous ramène à la question centrale non évoquée dans la zone Euro : comment réactiver l’économie réelle après les déséquilibres de l’économie financière ? Comment dépasser les principes verbaux de mise en ordre des finances européennes pour aboutir à la création d’une union fédérale permettant de redonner enfin toutes sa signification à la banque centrale et à l’Euro qui ne serait pas créés que pour la politique monétaire mais aussi pour la politique de croissance ?

Les pays africains devront subir les effets de la hausse de l’Euro par rapport au dollar et s’organiser au mieux pour sauvegarder leurs économies, ce qui signifie une approche plus prudentielle et plus préventive de la politique économique dans ces différents pays de la zone France.

Les crises financières depuis 2008, la crise actuelle de la dette souveraine, la crise économique qui va émerger, les turbulences autour de la parité Euro-Franc CFA, doivent être méditées et saluées par les gouvernements africains de la zone Franc dans la mesure où ces éléments de déséquilibre permettent de réfléchir et de travailler autrement et de façon responsable en appliquant réellement les programmes pour lesquels on a été élu, même si la réalité de la crise oblige à s’écarter de la nature des programmes économiques. Encore faut-il avoir un programme solide, valable, qui ne soit pas un simple condensé de principes bavards pour se faire élire et qui très vite est oublié car inconsistant et inapplicable.

Lucien Pambou


28/12/2011
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