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Didier Awadi : « Il faudrait qu’on arrête en Afrique de tripatouiller nos Constitutions pour rester président à vie »

 

 les Sénégalais du pays et de la diaspora  ont jouées leurs roles de citoyen pour le premier tour des présidentielles 2012. Des élections qui ont été émaillées de violence et d’une tension sans précédent. Didier Awadi, rappeur sénégalais, est un fervent amoureux de l’Afrique et passionné d’histoire. A l’approche de la sortie de son nouvel album, le militant engagé se livre sur la situation. Rencontre.

Afrik.com : Vous êtes à nouveau en studio pour la préparation d’un nouvel album dont la sortie est prévue pour avril 2012. Que concoctez-vous de spécial ?
Didier Awadi :
Pour le nouvel album, je n’ai pas encore le titre mais ce sera toujours dans la veine de ce que j’ai déjà fait, un album militant mais il sera assez dansant, toujours panafricain. C’est la direction musicale qui m’a aidé à faire beaucoup de morceaux dansants. Même si ça fait réfléchir il faut que les gens dansent. Je pense que durant plusieurs années le rap conscient est passé à côté de l’aspect ludique, cela afin de toucher le plus de monde possible. Pour cette fois, le travail sur le son est très poussé j’ai travaillé avec mon équipe mais aussi avec des gens qui viennent du Canada, des Etats-Unis, et chacun est venu avec sa touche de fraîcheur. Ça va être du Awadi de 2014, pas du Awadi de 2012.

Afrik.com : Actuellement le Sénégal est en pleine période électorale et les Sénégalais sont appelés à voter ce dimanche pour élire leur Président pour sept nouvelles années. Quel regard posez-vous sur la situation ?
Didier Awadi :
J’ai un regard assez critique car on se retrouve avec un président qui a fait deux mandats et qui veut en briguer un troisième, ce qui est anticonstitutionnel. Notre Constitution est très claire, deux mandats et pas trois. Il faudrait qu’on arrête en Afrique de tripatouiller nos Constitutions pour vouloir rester président à vie. Tout le monde doit pouvoir exercer le pouvoir et chaque équipe doit pouvoir montrer son amour à son pays. Le pays est à tout le monde. Au Sénégal on a une grande coutume de démocratie et quand on voit des gens qui violent cet élan démocratique, on se dresse tous comme un seul homme contre la candidature illégale d’Abdoulaye Wade.

Afrik.com : Face au président sortant, il y a un mouvement citoyen qui s’engage « Y’en a marre »
Didier Awadi :
Oui, c’est la jeunesse militante qui se met ensemble, notamment des rappeurs. Ils veulent juste qu’on respecte la Constitution parce que tout le monde est saoulé de ce qui se passe. C’est l’aboutissement d’un effort qui a débuté depuis le début du hip-hop sénégalais et aujourd’hui les jeunes sont conscients. Et c’est la qu’on attend la jeunesse. Ils ont aussi développé tout un lexique dont le « nts » à savoir, « nouveau type de Sénégalais », un Sénégalais plus responsable et patriote. On a besoin de se définir et de se projeter différemment lorsqu’on voit tout ce qui se passe dans notre société. C’est soit tu restes passif et tu bois du thé sans bouger, à s’enivrer et baisser les bras pour certains, ou bien tu acceptes de te remettre en question et tu demandes qu’est ce que tu es prêt à offrir à ton pays.

Afrik.com : Vous-mêmes en 2000, vous aviez lancé aussi un thème un peu similaire, le « boul falé ». Vous pouvez nous en dire plus ?
Didier Awadi :
Oui c’était pas un mouvement mais il y eu la génération « boul falé » qui veut dire « laisse ber-tom, ne te prends pas la tête » qui s’est pris en charge. C’était pour mettre l’accent sur le fait que les politiciens ne respectent pas le contrat moral avec nous, donc nous nous prenons en charge. Et aujourd’hui c’est de la même veine, quelque part on les a inspiré, on le fait dans d’autres pays alors si on peut le faire chez nous aussi, c’est une bonne chose.

Afrik.com : Nous parlons de jeunes Sénégalais qui s’engagent. Mais comment fédérer au-delà du Sénégal ?
Didier Awadi :
Je pense que les jeunes se fédèrent naturellement, sur presque tout le continent on a un vrai réseau de frère avec qui on mène de vraies actions. Maintenant, certains peuvent plus ou moins bien travailler selon la situation de leurs pays. Cela dépend du contexte de chacun mais les artistes militants conscients il y en a dans tous les pays. Moi j’ai fait une quarantaine de pays et dans chacun d’eux j’ai des gens sur qui je peux compter à 100%. Je pense par exemple à Smokey au Burkina, les Djanta Kan au Togo, les Ardiess au Bénin, bily bily en Côte d’ivoire… Il y en a un peu partout et on est vraiment en réseau.

Afrik.com : Dans votre studio, je vois pas mal de personnalités africaines comme Thomas Sankara, Aimé Césaire, Frantz Fanon et j’en passe. Pourquoi ces tableaux ?
Didier Awadi :
Ce sont des gens qui m’inspirent et me donne une ligne directrice. Ils me confortent dans l’idée que l’Afrique n’est pas démunie elle est seulement désunie. Ils me confortent dans l’idée que l’Afrique n’est pas pauvre elle est appauvrie. Nous avons tout ici et si ces gens là ont donné leur vie pour un combat, notre devoir est de prendre la relève. Je ne fais pas de fausse nostalgie mais je veux penser à une Afrique où il y a un vrai marché commun, une banque centrale commune, avec sa propre monnaie. Avec l’accélération des nouvelles technologies, personne ne peut nous faire croire à une chimère, c’est l’occasion d’enfin prendre son destin en main.



27/02/2012
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